1 SansFumée: Mme Buzyn pense t-elle ce qu'elle dit ?

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samedi 22 juillet 2017

Mme Buzyn pense t-elle ce qu'elle dit ?

Mme Buzyn pense t-elle ce qu'elle dit, ou dit-elle ce qu’elle pense vraiment, sur la vape ?  

Quelques réflexions, suite à la réponse de la ministre de la santé Agnès Buzyn à la question posée par le député Olivier Véran, concernant sa position sur la vape, et à des commentaires vus ici ou là. 
 
L'ingénue Agnès Buzyn attend qu'on lui démontre que le vapotage est utile
J'en vois qui trouvent dans sa réponse, « Si on me démontre que le vapotage est utile, je changerais éventuellement la façon dont il est encadré aujourd'hui en France », une preuve d'ouverture et un signe d'espoir quant-à l'évolution de la perception future de la vape par nos autorités, ou même quelques attentes d'assouplissement de la réglementation. Ou d’autres qui y voient un appel du pied, et qui pensent qu’en lui apportant plein d’études et les démonstrations qu’elle réclame, tout irait subitement mieux !

 

Flash back 

Petit retour en arrière pas inutile, d'abord. Mme Buzyn, médecin et professeure de médecine, a été membre du conseil d’administration de l’Institut national du cancer (INCa) à partir de 2009, puis en est devenue la présidente en mai 2011. Poste qu'elle a quitté en mars 2016 pour prendre la présidence de la Haute Autorité de santé (HAS).
 
Il faut rappeler ici que l'INCa est l’agence d'expertise sanitaire et scientifique en cancérologie de l’État, cet organisme étant placé sous la tutelle conjointe du ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, et du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Une agence qui doit avoir quelques comptes à rendre, donc.
 
En 2013, suite à la publication du « rapport Dautzenberg », l'INCa rendait public son avis, à contre courant de toutes les positions qui prévalaient alors sur la vape (et qui prévalent toujours, pour beaucoup) dans tous les autres organismes ou agences de santé dépendant de l'état. *Le lien en cache de cet avis du 3 juin 2013 ici , ou un extrait en copie d’écran ci-dessous : 

Extrait de l'avis de l'INCa du 3 juin 2013

Aucun doute sur le fait, même si un tel avis représente, non pas celui de sa seule présidente (et comme elle a effectivement déclaré ne pas avoir d’avis personnel), mais un consensus trouvé auprès de ses membres, qu'il n'ait pas été rédigé et rendu public sans l’obtention préalable de l'aval de sa dirigeante, tellement il allait à rebours des discours officiels d'alors sur la vape. Elle ne pouvait donc qu'être parfaitement au courant de la littérature de l'époque, pour pouvoir laisser jusqu’à conclure dans cet avis que « l'apparition des cigarettes électroniques permet aujourd'hui [en 2013, donc] d'envisager une politique de réduction des risques lié au tabac ».
 
Étonnant donc qu'en 2017, alors que de multiples études et enquêtes sont venues depuis rassurer quant-aux risques de «passerelle pour les jeunes», de vapotage passif. Et encore d'autres venues confirmer l'arrêt effectif du tabagisme pour 400.000 français, selon le Baromètre santé de l'INPES 2014, ou 1 million suivant l'évaluation de K. Farsalinos de l'Eurobaromètre 2014. Sans parler des chiffres du tabagisme, en chute libre en Grande-Bretagne, de leur rapport PHE ou la position du Royal College of Physicians sur la vape. En France, de nombreux médecins et professionnels de santé ont observé, analysé, écouté des vapoteurs, et ont fini par voir l'intérêt du vaporisateur personnel comme outil de réduction du risque tabagique, puis ne pas fermer la porte ou même conseiller la vape aux fumeurs. Étonnant, disais-je, que Mme Buzyn, de ses hauts postes de présidente de l'INCa, de la HAS, puis de ministre n'ait rien vu passer, rien suivi, rien su de tout ça, elle qui démontrait pourtant être particulièrement au fait de tous les aspects et enjeux du sujet, y compris à l’international, dans cette tribune du 31 mai 2013, dans le journal Le Monde !
 

Moins pire que Marisol ? 

Marisol Touraine, sa prédecesseure, qui ne s'est pourtant jamais particulièrement distinguée pour encourager ou pour faciliter l'accès ou l'usage de la vape, et même si elle a parfois évoqué des risques aussi farfelus que celui du « geste de séduction » auquel la vape exposerait les non utilisateurs, n’a jamais été jusqu’à nier le potentiel de la vape à aider les fumeurs à sortir du tabagisme. Au mieux, l’ancienne ministre se gardait bien de trop évoquer les études existantes et rassurantes... ou gênantes pour elle. (Même si, acculée face aux questions des sénateurs en 2015, elle a quand même atteint le pire en une occasion, accusant ses homologues anglais de s'être laissé influencer par l'industrie du tabac et de la vape, dans leur rédaction du rapport du PHE).
On a aussi à plusieurs reprises entendu l'ex-ministre déclarer que « la vape, pour les fumeurs, c'était très bien », ou « qu'il valait mieux vapoter que de fumer » *à revoir ici, une déclaration de février 2014, ou sa réponse lors d’une question à l’Assemblée Nationale, le 4 juin 2014 ici.
Et elle a même laissé se créer un «groupe vapotage» qui se réuni désormais régulièrement au ministère de la santé, permettant d’établir enfin un dialogue et d’entrevoir quelques perspectives d’évolutions des règles qui encadrent la vape. Loin de moi l'idée de me faire l'avocat de Marisol Touraine, hein (faut pas déconner non plus), tout n’a pas été rose durant son ministère, loin de là. Mais sachons avoir une vision juste et objective !
 
Nier les évidences et les preuves, c’est pourtant bien ce qu'a fait Mme Buzyn dans de récentes déclaration au journal «Le Parisien», ou qu'elle réitère dans cette réponse à Olivier Véran, en prétendant « que la vape ne permettait pas d'arrêter de fumer » ou « n'apporte pas du tout le bénéfice souhaité en terme d'arrêt du tabac ». Pas juste un mot de sa part pour dire que la vape est quand même moins pire que le tabac, histoire de ne pas décourager les fumeurs qui souhaiteraient essayer de moins se détruire la santé, en adoptant cette alternative. Les “études” ne lui démontrant pas que la vape “est utile”, ou encore moins qu’elle permet d’arrêter la clope, le “principe de précaution” de la Ministre de la Santé serait donc de ne pas essayer, tant pis si les fumeurs restent fumeurs... En cela, c’est un véritable recul, et elle fait effectivement pire que Marisol !
 
Dans sa grande bienveillance, Agnès Buzyn laisse tout de même une porte entrouverte, en déclarant que si « on lui démontre que le vapotage est utile », elle changera...» n'omettant pas d'y rajouter un « éventuellement » prudent. Quand bien même nous lui apporterions des tonnes d'études dénombrant des millions de vapoteurs sortis du tabac fumé, sans la moindre trace de début d’impact négatif sur leur santé, même pas sûr qu'elle revoie sa position, donc. 
 

Mais que lui apporter de plus que ce qu’elle a décidé de ne pas voir ???  

Arrêtons donc là la naïveté ou l'angélisme et de voir en Mme Buzyn un espoir de meilleurs jours pour la vape, elle sait parfaitement bien quels peuvent être ses intérêts et son potentiel. Ne la prenons pas pour la parfaite ingénue pour laquelle elle voudrait se faire passer, et qui attend juste qu’on lui démontre quelque chose ou qu’on lui apporte des preuves. Que pourrions nous lui apporter de plus qu’elle ne connaisse déjà, puisqu’elle a décidé de ne pas voir. C’est juste un jeu de dupes qu’elle nous propose !
 
En réalité, ses déclarations actuelles ne sont que le reflet de ce qu'on lui dit de dire ou de faire, sur la vape comme sur d'autres sujets, d’ailleurs. Il suffit de voir ses atermoiements récents sur le tiers payant généralisé, ou ses réponses hésitantes sur la date d’atteinte du prix du paquet de clope à 10€. (Oups, pardon... c’est vrai qu’il faut recevoir et négocier tout ça avec les buralistes, d’abord). Ou encore quand elle déclare partout où elle a l’occasion de s’exprimer qu’elle «a horreur des obligations», avant d’obliger aussitôt à 11 vaccins !
 
Alors qu’est t-il donc arrivé à Agnès Buzyn, celle qui qui déclarait « J'espère avoir du courage. Les convictions sont plus fortes que la carrière... », il y a peine plus d'un an, pour qu’aujourd’hui, elle ne voie dans la vape rien d’autre qu’un vulgaire gadget qui ne permet pas d’arrêter de fumer ?
   
  Un général dont les convictions sont plus fortes que la carrière... 
Et bien, elle est juste devenue ministre. 
Et elle obéi à son chef, elle... 

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